Vers une digitalisation équilibrée

Qu’est-ce que la digitalisation? Voilà une notion un peu «fourre-tout» qui fait appel à une large palettes de perceptions, très variables selon son propre degré de perméabilité aux nouvelles technologies. Lors de sa session de février, le Grand Conseil s’est prononcé en faveur d’une recommandation libérale-radicale 22.228 intitulée «Stratégie digitale cantonale», abordant notamment la sobriété numérique et le champ d’action des data centers de l’Etat. A notre grande surprise, le groupe libéral-radical a fait échouer l’amendement UDC qui rétablissait un tant soit peu de bon sens en supprimant l’incitation à se profiler comme un hébergeur pour les entreprises privées. Il reste à espérer que sur le terrain, l’esprit de collaboration et non de concurrence avec les acteurs privés locaux l’emportera.

«Chacun d’entre nous possède sa propre représentation de ce qu’on appelle la transformation digitale, évoquée dans cette recommandation.

Ce terme de transformation digitale implique dans son interprétation une partie de notre imaginaire, qui peut dans ses extrêmes, aller de la simple idée de numériser des feuilles volantes pour en faire des pdf, à celle d’un monde entièrement automatisé et gouverné par les machines et les intelligences artificielles, comme dans les fictions spéculatives des années 1980.

Depuis toujours, les nouvelles technologies donnent lieu à des comportements très différenciés chez chacun d’entre nous, soit l’adoption, soit la méfiance, voire même la peur et le repli, selon qu’elles sont considérées comme des outils ou comme des menaces. A l’heure actuelle, le champ des perceptions est large et encore difficile à cerner, tout comme les tentatives de délimitation du rôle attendu ou souhaitable des autorités publiques dans ce domaine.

Raccrocher les wagons avec habileté

Dans les faits, les progrès et l’adoption de nouvelles technologies sont bien trop rapides pour que les législateurs parviennent à les précéder, ceci à tous les niveaux. Le train va trop vite. Toutefois, il n’est pas impensable de parvenir à raccrocher quelques wagons qui réduisent l’écart et peuvent même être réfléchis, avec un peu d’habileté, de façon à appréhender le futur plus sereinement.

Depuis le début de la législature, le Conseil d’Etat a franchi un pas important en intégrant la notion de «digitalisation» dans le nom d’un Département, et notre parlement s’est doté d’une commission de digitalisation. Ces changements ont également été marqués par la nomination d’une déléguée – et bientôt cheffe de Service – dont nous avons très attentivement pris note des intentions en matière de stratégie digitale et en qui nous plaçons notre confiance pour la suite des opérations.

Des enjeux sociétaux majeurs

Nous saluons ces décisions, qui démontrent une attention particulière portée à cette thématique qui comporte un grand nombre d’enjeux démocratiques et sociétaux majeurs tels que:

  • L’équilibre entre l’encouragement à l’innovation et la protection des droits et des intérêts du citoyen ;
  • La possibilité pour des collectivités publiques géographiquement délimitées de réglementer des technologies qui ne le sont pas par nature ;
  • L’inquiétude face à la monétisation des données par les géants mondiaux de la technologie dont le pouvoir économique est croissant ;
  • La protection des données relevant de la sphère privée ;
  • L’augmentation de la cybercriminalité ;
  • La sobriété énergétique du numérique ;
  • Et depuis peu, l’émergence d’outils qui questionnent le processus d’acquisition des connaissances.

La recommandation qui nous est soumise aujourd’hui portant sur la stratégie digitale de l’Etat nous paraît enfoncer quelques portes ouvertes… Elle comporte également l’idée étrange émanant du groupe libéral-radical d’introduire le démarchage d’entreprises privées, proposition combattue par l’amendement du groupe UDC auquel nous nous rallions.

En effet, l’idée de se profiler comme un fournisseur d’hébergement et de concurrencer des entreprises suisses ou locales dans ce domaine ne nous paraît pas relever du rôle de l’Etat. Nous adhérons cependant à l’idée exprimée d’un «cloud souverain» fiable et stable, pour autant qu’il puisse être envisagé en créant des synergies intercantonales et dans un esprit de partenariat public-privé avec des spécialistes locaux.

Il nous semble primordial d’admettre, dans un domaine aussi mouvant et complexe, que l’union fait la force.

Nous accepterons cette recommandation assortie de l’amendement UDC. Nous accepterons également les deux amendements socialistes, l’un portant sur les ressources énergétiques, et l’autre sur la nécessité d’une étude préalable sur l’opportunité de créer un Centre dédié à la cybersécurité.»

Lire la recommandation 22.228 « Stratégie digitale cantonale »

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